Évidemment, comme c’est l’été, les vacances, la mer et tout ça, sans oublier le camping des Flots (Bleus), pas question de rater une telle perche.
Pensez donc ! Dick Dale, avec tout ce qu’il trimballe : les planches sur les vagues de Californie et les traversées dans le désert !
Et une musique qu’il crée en toile de fond de son sport favori.
On laisse le versant désert et on prend le versant surf. Parce que c’est là que D.D. a érigé et systématisé tout ce qui allait faire de lui l’un des plus grands guitaristes de rock. Inventif, innovateur et, cerise sur le gâteau, un modèle pour les héritiers futurs qui jouaient encore sur les plages de sable avec une passoire, une pelle, un seau et un râteau en plastique. En attendant de sortir du bac à sable et de passer le leur !
SRV par exemple. Sans parler des métallos.
Impossible de ne pas penser à Motorhead en écoutant “Nitro” (versant désert).
Sûr que le style de D.D. (Richard Monsour pour l’état civil) est reconnaissable entre mille. Les ingrédients ? Un staccato d’enfer, des cordes d’un tirant assez musclé (*), la réverb’ à donf., mais alors à fond de chez à fond, être gaucher (**) jouant “upside down” (comme Otis Rush ou Albert King). Ajoutons l’emploi obligatoire, incontournable, systématique et outrancier de certaines gammes orientales. Dans son cas : principalement la gamme égyptienne. Pour faire simple, disons que la musique orientale reluque plus vers la mélodie que vers l’harmonie. Et que la première grande influence de Dick Dale est Gene Krupa. Ce qui n’a aucun rapport. Glissons.
Seulement voilà : D.D. a mis le paquet pour établir la surf-music en tant que style. Voyez un peu : il invente (ou presque) le premier stack : le Fender Dual Showman (100 watts, énorme à l’époque), qu’il conçoit avec Leo Fender. Lequel Leo lui donne sa première Strat, guitare qui deviendra un modèle “signature” pour droitier dans les années 90s. Stratocaster qu’il surnomme “The Beast” et à laquelle D.D. est toujours resté fidèle depuis ses débuts, enfin presque puisqu’on l’a vu surfer avec une Belvedere Deluxe, modèle de chez DiPinto, facteur de Philadelphie. N’empêche que Leo venait d’ériger “l’endorsement”en stratégie commerciale intensive.
Pour la petite histoire : le bon Leo, flairant d’où vient le bon vent, équipe un sacré paquet de groupes (les Trashmen par exemple) avec pratiquement toute la gamme Fender Jaguar, Mustang et autres Strat. Basses et amplis compris. Toute la gamme Fender ? Sauf la Telecaster, l’exception qui confirme la règle et dont le “pourquoi pas elle ?” est évident : les surf groups étaient attirés par les formes nouvelles. Alors, une guitare qui ressemble à une planche à découper ….. Un autre qui avait senti le vent arriver, c’est Frank Sinatra qui voulait Dick Dale comme poulain moyennant 90% de ses gains. On devine aisément la réponse de D.D. !
Donc, Dick Dale dans une séquence qui évite quelques écueils du genre : le boxer short, le bikini, les serviettes étendues sur la plage, les teenagers dansant autours du feu de camp sur la plage abandonnée. Tout ce beau linge twistant devant un transistor en snapant comme pas permis. Mais le film en fond (le surfboarder, les nougats collés à la planche, arc-bouté, sortant du tube d’un volute) reprécise où l’on est. Des fois que l’on puisse avoir de vagues doutes. On sait jamais. Surtout quand on est fatigué et au bout du rouleau ….. au printemps par exemple.
Le morceau : “Surfin’ & A Swingin”. Vous allez me dire que je ne sais pas lire…. or, c’est la vidéo présentée ici qui est mal titrée mais elle a le mérite d’exister puisque TonTube l’a sucrée récemment. Ce chef d’œuvre télévisuel est un medley dont “Misirlou”, est la pierre angulaire. “Misirlou” qui est une reprise d’un n°1 des charts turques dans les années 40. “Surfin’ & A Swingin”, basé sur le même thème que “The Edge”, est un extrait de la B.O. de l’immortel chef d’oeuvre “A Swingin’ Affair”. Tiens, puisque l’on parle ciné, Dick Dale, non crédité au générique, campe, dans “Le Milliardiare” avec Marilyn Monroe et si ma mémoire est bonne, un sosie de Presley.
On resserre…..
L’émission : l’Ed Sullivan Show. C’est Ed Sullivan soi-même qui annonce le titre et lance D.D. dont c’est la première grande télé sur les networks yankees.
Diffusion : le 6 octobre 1963 (si vous saviez le mal pour obtenir cette date) lors de la 7ème saison de l’émission.
Au programme : The Angels et Totie Fields.
On notera l’évidente sincérité de D.D. par rapport à ses credo : le surf et la guitare. Son chant est bouleversifiant, témoin le deuxième couplet. Et puis, cette façon de faire tanguer la mâchoire sans mâchouiller un chouine-gomme, de balancer le corps. Précision : cette version ô combien sublime n’a pratiquement plus rien de commun avec celle du film, ici les paroles ont été amputées de deux couplets par rapport à la version du film qui, lui, a l’intégrale des textes dans une variante assez cotonneuse niveau prise de son.
Chez Monsieur Ed, le play-back était exceptionnel. Enfin, pas toujours. Mais là, visiblement c’est du direct-live : le signe de tête aux Del-Tones est significatif. Quelques gros plans montrent bien que la guitare est pluggée. C’est si vrai qu’il fait signe aux techniciens de pousser les manettes (à 1:46) et que soudain le son devient plus ample.
Où l’on s’aperçoit que Dick Dale est vraiment bien plus qu’une fine lame et une figure de proue… ouiiii, je sais !!!
Au bout du compte : un courant à lui tout seul.
Ouèche !
Professor BeeB HôPô.
(*) 16, 18, 20, 38/39, 48/49, 58/60. Comme à l’époque ce n’était pas encore des tirants standards (de nos jours pas vraiment idem itou) D.D. fait fabriquer ses cordes spécialement pour lui.
(**) Puisqu’il est question de gaucher : Jimi Hendrix termine “Third Stone From The Sun” par ces mots : “Vous n’entendrez plus jamais de surf music !” – And you’ll never hear surf music again.” Beaucoup ont pensé que c’était une condamnation disons assez négative du genre. En fait Hendrix savait pertinemment que Dick Dale souffrait d’une tumeur cérébrale, et cette pour cette raison qu’il écrit et murmure “nous n’entendrons plus jamais de surf music.” Quand Dick Dale entend “Third Stone From The Sun”, il pense que c’était la manière dont Hendrix (qu’il avait rencontré en 1964) encourage sa convalescence. Ce qui était le cas !
Quel Chanteur et Très grand Guitariste. …..!!!….Chapeau je ne connaissais pas ! !!!….trop jeuns en ….1963 ! !!..
Très curieux, on dirait qu’il joue avec les cordes montées à l’envers, c-à-d les grosses cordes en bas. Je dis curieux parce que c’est pourtant une guitare gaucher. … mais apparemment montée en droitier. Pas courant.
Oui, c’est connu
C’est bien décrit dans l’article ! Dick Dale joue “upside down” donc au lieu de Mi La Ré Sol Si Mi (de la corde la plus grave à la plus aigue), çe qui donne “à l’envers – upside down” : Mi Si Sol Ré La Mi”. Voilà !
Ouèche !
C’était un surfeur et pas un Beach Boy !
Merci à toi Professor pour ce bel hommage d’un grand Artiste de la Stratosphère !
GEANTISSIMO !!!
Excellent article sur un fabuleux musicien !
Savoureux
Merci, ça fait vraiment plaisir….. Have a (very) gôôd year comme on dit chez Sinatra et Michelin…. Prof.
Oh la la, la ola pour toi ! C’est joliment déroulé encore ça ! Tu surfes sur les mots, c’est un régal ..
Je suis béate d’admiration pour ton analyse aussi approfondie que spirituelle. Bravo ! Merci !
Anne-Marie
J’ADORE DICK DALE SUPER GUITARISTE A TOMBER!!!!